J’innove dans le conseil en environnement et je ne suis pas une startup, c’est grave docteur (2)?
Le monde du conseil en environnement innove après être longtemps resté un domaine d’experts. L’offre y était limitée et la demande des donneurs d’ordres publics régulière. Les clients étaient essentiellement des collectivités ou des grands comptes privés industriels sur des activités à risques.
Eloigné du monde des startups, comment ce secteur innove-t-il?
Les évolutions d ‘un marché sous pression
Mais le marché a été bousculé et a contraint les acteurs à repenser leurs modèles. c’était indispensable pour continuer à se développer, ou tout simplement pour survivre.
- La contrainte règlementaire y est de plus en plus forte et s’étend à des acteurs de plus en plus nombreux. Ce facteur élargit le marché, mais élève le niveau d’exigence pour certaines prestations.
- La commande publique est devenue plus exigeante, avec moins de moyens. La concurrence sur les appels d’offre publics et les consultations privées est donc très forte. En conséquence, les prix pour les prestations les plus classiques comme les études d’impact sont tirés vers le bas.
- De plus, les acteurs publics internalisent parfois certaines compétences, privant certains cabinets d’un flux d’activité substantiel. On a assisté récemment à une vague importante de retour à la gestion de l’eau en régie y compris dans de grosses métropoles, notamment à Bordeaux. Le sujet est en cours de discussion à Toulouse.
- Le champ des compétences mobilisées sur les missions s’est élargi. Il faut maintenant faire intervenir des techniciens spécialistes de l’eau, des sols, de l’air, de la biodiversité, des déchets, des risques industriels,… Mais les entreprises ont aussi besoin de juristes experts de la règlementation et encore d’informaticiens pour analyser des données de plus en plus complexes.
- Ainsi, une concurrence accrue et multiforme est apparue. Désormais de gros cabinets détenant toutes les expertises côtoient des indépendants travaillant en réseau.
Les voies utilisées par les entreprises pour s’adapter et innover dans ce secteur passent alors par plusieurs axes de mutations stratégiques.
Diversifier ses marchés
Nombreux sont les cabinets qui se sont retrouvés avec une situation de très fort risque commercial. En effet leur chiffre était à plus de 80% assuré par moins de 3 ou 5 collectivités. Elles étaient parfois dans un périmètre local très limité. Ceux qui n’ont pas su aborder se diversifier ont disparu ou ont été absorbés par des cabinets plus gros.
Ceux qui ont suffisamment anticipé ont su diversifier et valoriser leur expertise sur de nouveaux marchés. Biotope, expert du conseil en biodiversité a mis en place une stratégie forte sur le développement à l’export dans des zones sensibles comme la Chine.
Grossir par intégration de cabinets experts complémentaires
Le mouvement naturel du secteur est à la concentration. Certaines holding bien positionnées sur une approche développement durable intègrent progressivement de plus petits cabinets expert. Indiggo peut ainsi revendiquer une position forte de généraliste.
Passer de la vente d’expertise, à la vente d’outils ou de méthodologie
L’un des chemins généralement envisagé pour se différencier et faire valoir son expertise est de passer de la vente de service à la vente d’outils surtout logiciels.
Cependant cette option stratégique prend généralement du temps, si elle est possible. Il s’agit à la fois de changer l’approche commerciale et l’organisation de la production en interne. Il s’agit aussi d’intégrer une logique produit là où on raisonnait par projet. En général, cela nécessite une forte mutation des équipes et de l’organisation, voir la création d’une entité ou filiale différente. Les entreprises qui parviennent à positionner une vraie logique produit logiciel sont souvent des généralistes issus du monde logiciel QSE comme https://www.winlassie.com/
Pour les PME spécialisées dans le conseil en environnement, il s‘agira plutôt de vente de solutions complètes ciblées. On peut citer Predict à Montpellier qui valorise sa méthodologie de Plan Communal de Sauvegarde. Il est vrai qu’ils ont pu développer une stratégie d’offre ciblée grâce à un actionnariat solide.
En revanche, il sera difficile de passer du conseil à la vente de solutions quand l’activité est déjà très dégradée.
Passer de l’expertise au service ou au pilotage de projet
Une partie des cabinets de conseil en environnement peut aussi faire le choix de se positionner en maitrise d’ouvrage ou Assistance à maitrise d’ouvrage . C’est le cas dans les projets liés à l’assainissement, à l’aménagement hydraulique, à la gestion des sols, des déchets de la biodiversité…. Cela s’avère pertinent quand le cabinet dispose d’équipes techniques de terrain efficaces, réactives et en proximité. Le cabinet Gaxieu anime par exemple un réseau de 10 agences de proximité en Occitanie.
Animer et engager les parties prenantes
Enfin, d’autres sociétés d’expertise et de conseil en environnement comme Envilys développent, pour se différencier, une compétence d’animation de la concertation autour des projets. Elles apportent ainsi, en plus de la connaissance technique, un accompagnement fort pour aider les porteurs de projets à rendre acceptables des projets d’aménagement dans leurs territoires.
Etre la « crème des experts » et le faire-savoir
Dans tous les cas, l’une des clés sera également de construire et capitaliser de la connaissance et de devenir incontournable sur le sujet. Un historique très important, une base de données conséquente, une expertise technique très pointue peuvent le permettre. Ces cabinets deviennent alors des experts de la veille environnementale, des spécialistes du benchmark et des états de l’art. Ils construisent des livres blancs et baromètres sectoriels, animent des conférences…
Par contre, cela ne fonctionnera que si un ou plusieurs membres de l’équipe, légitimes et reconnus par leur pairs, font un travail important de relationnel et de visibilité. Le référent sera présent dans les commissions, fera du lobbying dans les réseaux qui comptent, diffusera du contenu… Autant de travail de communication et de visibilité maîtrisé par les gros cabinets de conseil généralistes et pas quelques spécialistes comme UTOPIES . Cette pratique demande un gros travail aux équipes de la majorité des cabinets de conseil en environnement.